Les Maori du XXIème siècle et leur relation au « progrès occidental »
La « religion du développement » que l’Occident a propagé au XXe siècle est comparable au christianisme répandu au XIXe siècle par les missionnaires. L’arrivée d’une société de consommation n’est pas sans conséquences sur le mode de vie des habitants surtout dans les régions les plus en relations avec le reste du monde.
Les Maori sont amené à concilier le développement technologique, la démocratie, les libertés individuelles, la vie privée au sens occidental, avec la logique collective traditionnelle et une organisation sociale très hiérarchisée.
L’économie ancienne était, au-delà de la satisfaction des besoins de subsistances, une économie cérémonielle - voire de fêtes - reposant sur le don, la coopération, mais surtout le prélèvement effectué par les dominants (adì, ra’atira) sur les dépendants (manahume).
Avant l’arrivée des occidentaux, bien qu’il n’y eût pas de monnaie maori, l’économie maori était une économie d’échanges intenses par le canal de la chefferie et grâce au nombre et à l’importance des festivités qui avaient lieu. Elle n’exprimait pas les concepts de profits, d’accumulation ou de consommation que nous connaissons, mais répondait à des soucis de prestige, de réciprocité, de générosité.
Modification à la suite de la colonisation :
La colonisation a détruit en grande partie l’organisation sociale traditionnelle. La mise en place d’une administration du type occidental a conduit à une juxtaposition des us et coutumes locales avec des lois issues des systèmes démocratiques en vigueur en Europe. En particulier en ignorant le système des castes, et en conférant à chacun un statut individuel de citoyen, les colonisateurs ont déstabilisé l’organisation sociale basée sur la vie collective très hiérarchisées et fortement contraintes par des règles religieuses. Dans certains archipels continuent de se côtoyer le droit coutumier et le droit d’inspiration occidental. On assiste ainsi au maintien des règles tribales secrètes coiffées par le système administratif et judicaires imposé par le colonisateur.
A la modification de statut social s’ajoute celle des nouvelles croyances religieuses fermement imposées par les évangélisateurs.
L’économie nouvelle devient une économie mixte, à la fois économie traditionnelle (de subsistance et économie cérémonielle, l’Eglise se substituant en tant que support social à l’ancienne religion), mais aussi économie marchande. Le traditionnel respect de la préservation des ressources alimentaires et naturelles est oublié. Le respect de la nature n’est plus une préoccupation et les conséquences en sont devenues néfastes pour l’environnement. (Surconsommation d’énergie, multiplication des déchets non recyclables, dépendance vis-à-vis des produits importés…) Les signes extérieurs s’illustrent aujourd’hui par la dimension des véhicules 4*4 possédés, le recours à la climatisation excessive des locaux, la dimension des habitations, la prolifération des objets du confort ménager, et avec pour conséquences la disparition du sens partage et de la redistribution entre les membres des clans.
Une nouvelle structure sociale a remplacé la domination des ari’i par celle des propriétaires terriens, par l’encadrement colonial européen et par le développement d‘une forte diaspora commerçante chinoise. Avec l'arrivée du progrès technique, la qualité de la santé s'est améliorée, l'espérance de vie a augmentée, mais les modifications des habitudes alimentaires conduisent à une multiplication des cas d'obésité.
Des écarts considérable de niveau de vie sont apparu à la suite des décolonisations ou selon le niveau d’implication des tutelles sur la vie économique des territoires. La Polynésie française et la Nouvelle Calédonie sont les territoires qui ont le plus bénéficiés des largesses métropolitaines au moment des essais nucléaires pour l’un ou de l’exploitation des ressources en Nickel pour l’autre. D’autres comme Hawaï en devenant le 50ème état des Etats Unis se sont considérablement « américanisés ». A l’autre extrémité des micros états comme Tuvalu, Kiribati et d’autres, sont resté très pauvre (10 à 20 fois moins que la Polynésie française) et en marge de l’économie occidentale. Ils survivent économiquement très difficilement, sont devenu des terres d’émigration, et qui plus est sont confrontés à la montée des eaux consécutives au réchauffement climatique.
L’image idyllique de « paradis sur terres » des îles polynésienne ne sert que pour la promotion du tourisme de luxe au profit de groupes financiers. La culture des Maori risquent donc, comme la plupart des minorités du monde, de se dissoudre dans la globalisation et l’uniformisation ou de finir par un repli sur soi avec de revendications identitaires incomprises.
Ref : Christian Ghasarian, Tamatoa Bambridge et Philippe Geslin - Le développement en question en Polynésie française 2004 JSO
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